Conférence de presse de la mission transpartisane au congrès : L’Etat doit être au rendez-vous
Ce mardi 15 octobre 2024, la délégation transpartisane a convié les médias afin de faire un point sur les rencontres réalisées durant son déplacement dans l’Hexagone. Retour sur les détails de cette conférence de presse.
Les échanges de la délégation transpartisane à Paris
La résolution votée, à la quasi-unanimité, le 28 août 2024 par le Congrès demandant l’adoption d’un plan 2024-2029 de reconstruction et d’accompagnement de la Nouvelle-Calédonie pour éviter la mort économique et sociale du pays a été défendue, par une délégation transpartisane et interinstitutionnelle, auprès de la Présidente de l’Assemblée nationale et du Président du Sénat, des 19 groupes politiques représentés au Parlement, ainsi qu’auprès du Gouvernement de la République, du 24 septembre au 05 octobre dernier.
Tous les responsables politiques nationaux ont réservé le même accueil attentif et bienveillant à la délégation et se sont engagés à répondre aux attentes calédoniennes lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2025.
Le Premier ministre, dans sa déclaration de politique générale, s’est également engagé à « ouvrir une nouvelle période consacrée à la reconstruction économique et sociale de la Nouvelle-Calédonie ». Il l’a répété au Sénat où il a tenu « à confirmer clairement et solennellement à faire face à l’urgence économique et sociale de la Nouvelle-Calédonie, ou près de 25% de la capacité de production de l’économie a été détruite et où il faut reconstruire, redémarrer, préserver l’emploi ou retrouver l’emploi (…) ».
Par ailleurs la résolution demandait solennellement à l’Etat dans son article 1er « que des initiatives soient prises dans les meilleurs délais afin de rétablir le dialogue politique entre les partenaires de l’accord de Nouméa et de poursuivre les actions nécessaires au rétablissement de l’ordre public dans l’ensemble du pays », car il doit « retrouver la paix et la stabilité, condition sine qua non à la mise en oeuvre apaisée du plan 2024-2029 (…), ainsi qu’à un retour partagé de la confiance dans l’avenir ».
En ce sens nous nous félicitons des déclarations du Premier Ministre devant l’Assemblée Nationale et le Sénat qui a rappelé « l’importance de rechercher un consensus politique sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie ». Il a précisé que les « discussions seront soutenues à Paris par une délégation interministérielle placée auprès du Premier et du Ministre des Outre-mer ».
Cette proposition s’inscrit dans l’esprit de l’article 2 de la résolution qui demandait à l’Etat la « nomination d’un délégué interministériel à l’accompagnement et à la reconstruction de la Nouvelle-Calédonie, placé auprès du Premier ministre, ainsi que la création d’un comité interministériel dédié ».
Une visite du ministre des Outre-mer très particulière
Nous tenons d’abord à remercier François-Noël Buffet d’effectuer son premier déplacement en tant que ministre en Nouvelle-Calédonie. C’est une marque de considération à l’égard de notre pays au moment même ou d’autres collectivités ultramarines traversent des épreuves particulièrement difficiles.
Au-delà de l’importance symbolique de cette visite, nous demandons à ce que la venue du ministre des Outre-mer soit l’occasion de prendre acte des engagements budgétaires et financiers du Gouvernement de la République à l’égard du pays, qui devront se traduire, pour certains d’entre eux, par le dépôt d’amendements à l’occasion du PLF 2025.
En effet, même si le document budgétaire déposé sur le bureau du Parlement n’a probablement pas pu être travaillé par le ministre des Outre-mer, eu égard aux délais contraints, nous constatons qu’il prévoit essentiellement la possibilité pour la Nouvelle-Calédonie – en ce qui concerne les collectivités, les régimes sociaux et les services publics – de contracter des prêts auprès de l’AFD garantis par l’Etat à hauteur de 60 milliards, afin de refinancer les concours d’urgence octroyés au pays et à la CAFAT en 2024 (55 milliards F.CFP). Ce dispositif a également pour but de soutenir « le financement des mesures de réformes et de relance de l’économie calédonienne dans le cadre élaboré conjointement par l’Etat et les autorités compétentes de la Nouvelle-Calédonie » (extrait du PLF 2025).
Les réformes engagées par la Nouvelle-Calédonie, à moyen terme, devront permettre, nous précise le rapport de présentation du PLF 2025, « de restaurer la situation financière des diverses collectivités et assurer la soutenabilité de la dette ainsi contractée ».
Endetter la Nouvelle-Calédonie sur les deux prochaines générations ne nous paraît pas être la bonne voie pour restaurer la confiance. Par ailleurs, l’Etat a une responsabilité matérielle et morale en Nouvelle-Calédonie. Le Gouvernement central a changé mais la continuité de l’Etat s’impose.
La résolution adoptée par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie fonde les engagements de l’Etat
Nous demandons, d’abord, que ces engagements de l’Etat s’inscrivent dans la durée : Les Calédoniens ne veulent plus d’une aide au mois le mois, mais d’un horizon dégagé sur les cinq prochaines années.
Nous demandons également à ce que ces engagements de l’Etat se traduisent sous forme de subventions et non pas dans le cadre d’un endettement des générations futures. Nous avons estimé le coût de cet accompagnement à 500 milliards de F.CFP. Les estimations sur les aides apportées en 2024 (80 milliards de F.CFP) et celles nécessaires en 2025 (120 milliards de F.CFP) confirment nos prévisions initiales.
Nous demandons ensuite que ces engagements de l’Etat soient arrêtés et mis en oeuvre en concertation avec les élus et les forces vives: Nous ne voulons plus de réformes que Bercy tente d’imposer à l’arrachée – comme par exemple dans le cadre de la convention signée il y a 15 jours par le président du Gouvernement, un rendement supplémentaire pour la TGC de 8 milliards F.CFP, alors que la consommation s’effondre et que l’investissement public comme privé a disparu. Nous attendons un véritable partenariat quinquennal afin de rétablir progressivement l’équilibre structurel des collectivités publiques et des régimes sociaux en fonction de l’évolution de notre situation économique.
Nous demandons enfin que ces engagements de l’Etat intègrent les 3 principes qui fondent la résolution adoptée par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie :
- La compensation financière des pertes fiscales et sociales subies par les collectivités et les régimes sociaux sur les cinq prochaines années ainsi que les subventions d’investissement nécessaires à la reconstruction des infrastructures publiques détruites (qui s’élèvent à 50 milliards de FCFP), et la transformation des prêts covid en subvention (49,4 milliards) ;
2- Le financement des régimes de chômage partiel et total tant que l’activité économique n’aura pas repris, 24 500 calédoniens relevant aujourd’hui de l’un des deux dispositifs. A défaut, notre pays devra affronter des émeutes de la faim constitutives d’une véritable insurrection sociale, et cette affirmation n’est pas un excès de langage » ;
3- Le soutien aux entreprises au travers d’un plan dynamique leur offrant la possibilité de retrouver immédiatement une marge de manoeuvre en ce qui concerne leur trésorerie et, dans un second temps, d’être admises au bénéficie d’incitations fiscales leur permettant de s’engager dans leur reconstruction.
Pour un plan 2024-2029 porteur de propositions concrètes et effectives rapidement
Des propositions très concrètes et très précises ont été adoptées par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie sur la base du Plan mis en oeuvre par l’Etat au profit des Iles de Saint Martin et Saint Barthélémy après le passage du cyclone Irma, ou de la loi du 25 juillet 2023 intervenue après les émeutes en banlieue.
Par exemple concernant les aides aux entreprises demandées à l’Etat dans le cadre du Plan de reconstruction, la résolution prévoit la révision des décrets du 17 juillet 2024, l’ouverture de lignes de trésorerie sur 12 à 18 mois, la révision de la durée de remboursement des PGE, le financement du moratoire sur le paiement des cotisations patronales pendant une durée d’une année (avec étalement du remboursement sur les 5 années suivantes), une défiscalisation « spéciale reconstruction », la création d’un fonds d’investissement de proximité (FIP) Outre-mer « relance Nouvelle-Calédonie », etc…
Par exemple, concernant les aides aux salariés privés d’emploi, nous avons demandé à l’Etat le financement des régimes de chômage tant que l’activité économique ne sera pas redevenue créatrice d’emplois.
Par exemple, concernant les communes, nous avons sollicité la majoration exceptionnelle de la DGF ou de la DETR, etc…
Pour un Congrès de la Nouvelle-Calédonie souverain sur les réformes économiques, sociales et fiscales nécessaires
L’Etat demande à ce que le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie prépare des réformes notamment celles sur lesquelles il s’était déjà engagé lors des prêts COVID de 2020 et 2022.
Le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a présenté hier au Congrès, pour la première fois officiellement, la trame de son projet de PS2R qui est visé à l’article 18 de la résolution. Nous en avons pris acte. Chaque groupe politique aura l’occasion, dans les prochaines semaines, de se positionner par rapport à ces propositions, tout comme les partenaires sociaux qui doivent être réunis prochainement.